Où en est-on aujourd’hui de notre combat ?

27 mars 2023

État des lieux des procédures juridiques Bancs Publics. Où en est-on aujourd’hui de notre combat ?

Bancs Publics est engagé, depuis plus d’un an, dans un contentieux judiciaire contre la municipalité de Sète pour combattre son projet de parking souterrain de 300 places, sous la place centrale Aristide Briand, au cœur de la ville, lancé sans démontrer son utilité publique et sans étude d’impact quant à ses effets sur l’environnement et la santé, dans un contexte d’aggravation de la crise climatique, mais aussi d’une augmentation de la précarité pour de nombreux Sétoises et Sétois vivants déjà sous le seuil de pauvreté (25 % de ses habitants). Ce combat judiciaire est long, complexe, incertain. Plusieurs de ses étapes ont été encourageantes, d’autres décevantes. Nous vous en avons informés au fur et à mesure dans nos rassemblements, par tracts, dans les manifestations et sur notre site internet.

Ce mémo vise à remettre en perspective les éléments saillants de notre combat judiciare, dans ses plus récents développements. Afin de mieux comprendre où on en est et pour mieux vous informer, car face à nous, beaucoup de discours désinforment et sèment la confusion, visant à décrédibiliser Bancs publics et les milliers de personnes qui soutiennent ce combat.

Décryptage des derniers développements judiciaires

. Recours en Conseil D’État : L’association Bancs Publics s’est pourvue en cassation contre l’ordonnance du Tribunal administratif de Montpellier (TA) du 26 janvier 2023, par laquelle, la suspension de l’arrachage des arbres et celle du permis de construire ont été levées par la juge, au vu de l’arrêté du préfet du 21/12/2022, autorisant la déplantation des arbres. Ce pourvoi en cassation contre cette ordonnance a été déposé le 27 février 2023 par notre avocate au Conseil D’État, Me Claire Waquet.

Principaux arguments : L’ordonnance doit être annulée car l’arrêté préfectoral est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation. D’une part, le préfet s’est prononcé sur un dossier de demande incomplet (la Mairie et SPLBT ayant fondé leur demande sur l’aménagement de la place, sans mentionner le parking), d’autre part, les mesures de compensation exigées par la loi pour toute atteinte à un arbre d’alignement ne sont, en l’espèce, ni appropriées, ni suffisantes. Le recours en Conseil d’État n’étant pas suspensif, la Mairie, s’appuyant sur l’ordonnance du 26 janvier 2023 dernier, a donc pu faire procéder à l’arrachage des 57 arbres dont 55 tilleuls, et préparer les travaux.

Ce recours contre l’ordonnance du TA du 26 janvier 2023 est actuellement à l’étude, et nous saurons très bientôt s’il est jugé recevable. 

. Jugement au fond : Plusieurs recours en annulation ont été engagés depuis l’automne 2022 (Permis de construire le parking, Permis démolition-reconstruction du kiosque, Arrêté préfectoral de  déplantation des arbres, notamment) mais ces procédures pourraient, selon notre avocate, être jointes :  le tribunal ayant déjà relevé que les dossiers habilement saucissonnés par la mairie ne forment qu’une seule et même affaire.

Nous n’avons à ce jour aucune visibilité sur une date d’audience, en raison de l’encombrement du rôle. Le jugement au fond doit permettre d’examiner l’ensemble des arguments de fond soulevés, et non plus seulement des questions de procédure.

. Référé préventif : Ce référé a été demandé le 21 février 2023, au nom de nombreux riverains et avec l’appui de Bancs publics, par notre avocate, Me Gaëlle d’Albenas. Dans son assignation, celle-ci a demandé au juge de nommer un expert, la Mairie et la SPLBT n’ayant pas pris la peine, alors que cela relève de leur responsabilité, de faire vérifier l’impact sur les habitations de travaux aussi massifs et complexes. Par ordonnance du 17 mars 2023 – contre laquelle la Mairie et SPLBT peuvent faire appel dans un délai de 15 jours à compter du 17 mars – le Tribunal administratif de Montpellier a fait droit à cette demande, et a désigné un expert judiciaire, indépendant de toutes les parties, avec des missions étendues. Ce référé n’est pas suspensif, mais comme son nom l’indique, il doit permettre une expertise des immeubles avant même que les travaux ne démarrent.

Aux termes du dispositif fixé par l’ordonnance, l’expert doit :

– Prendre connaissance du projet de parking et donc se faire communiquer tous documents lui permettant d’en apprécier la nature, l’ampleur, les développements, le calendrier, l’impact sur les immeubles environnants.

– Visiter chacun des immeubles qui bordent ou avoisinent la place (et non pas seulement ceux où habitent les requérants), constater et décrire avec précision leur état.

– Déterminer les causes et l’étendue des dommages susceptibles de survenir dans les immeubles, au cours des travaux. Cette mention laisse entendre que la mission de l’expert se poursuivra durant les travaux.

– Indiquer la consistance, le coût et la durée probable de réalisation de travaux particuliers ou de mesures de sauvegarde si l’état des immeubles le nécessite, et pour éviter l’aggravation de cet état, apprécier le caractère d’urgence de ces travaux s’il y a lieu, et évaluer la dangerosité éventuelle de l’état des immeubles.

Entendre tous sachants, c’est à dire toutes personnes dotées de compétences utiles à sa mission, se faire communiquer tous documents et renseignements, faire toutes constatations et vérifications propres à éclairer le tribunal.

À noter :

À la différence d’un huissier dont le constat n’est qu’une simple photographie, à un instant T, et non une expertise des bâtiments, et dont l’indépendance vis-à-vis du mandant n’est pas garantie, l’indépendance et l’impartialité de l’expert judiciaire ne peuvent être mises en doute. C’est une garantie essentielle, au regard des droits et des intérêts des riverains, qu’ils soient requérants ou non requérants. L’expert judiciaire doit d’ailleurs prêter serment (par écrit, déposé au greffe et joint au dossier) et s’engager à «accomplir sa mission avec conscience, objectivité, impartialité et diligence (art R 621-3). 

Cette mission est étroitement contrôlée par le tribunal ; pour prévenir tout conflit d’intérêt, l’expert doit, en outre, déclarer tout lien avec l’affaire au président du TA qui apprécie s’il y a empêchement (art R621-5). Enfin l’huissier n’est pas un professionnel, à la différence de l’expert, il s’agit ici d’un architecte, Marc Dhauteville, qui sera amené à évaluer et donner son avis sur les techniques de sondage et de construction envisagées. 

Autre garantie importante, apportée par l’expertise judiciaire : l’expert peut prescrire des mesures provisoires et en apprécie l’opportunité s’il estime qu’il existe un risque sérieux (sondages sols, et présence d’eau notamment) pour l’état des bâtiments. Il en informe le président du Tribunal administratif. Il peut aussi demander l’intervention d’un sapiteur, afin de s’adjoindre un savoir technique d’un autre domaine que le sien (par exemple, en l’espèce, un hydrogéologue), en en demandant la nomination au président du Tribunal administratif (art R 621-2). 

À la différence du constat d’huissier qui est univoque et unilatéral, la procédure d’expertise est contradictoire, toutes les parties seront donc entendues par l’expert judiciaire et l’état des lieux des immeubles doit être fait en présence de toutes les parties concernées. Celles-ci (riverains, SPLBT, commune, architecte, entreprise) sont informées, par courrier RAR, (4 jours à l’avance au moins) de la date de venue de l’expert.

Les riverains peuvent soulever toutes sortes de questions quant à l’impact des travaux sur leur bien, leurs observations, de même que celles du maître d’ouvrage, sont consignées dans le rapport de l’expert (art R621-7) qui devra être remis au Tribunal administratif de Montpellier « dans les meilleurs délais ». Comme indiqué par l’ordonnance, chaque riverain recevra copie du passage relatif à son bien. La Mairie et la SPLBT reçoivent l’intégralité du rapport d’expertise et sont invitées à formuler leurs observations sous un  mois (art R 621-9).

L’expert se fait communiquer tout document utile à sa mission et ceci sans délai. Tout retard ou défaut de transmission donne lieu à signalement auprès du président du TA qui ordonne la production de ces documents, éventuellement sous astreinte (art R 621-7-1). 

Si nécessaire, pour un bon déroulement des opérations d’expertise, le Président du Tribunal administratif peut convoquer les parties ainsi que l’expert pour examiner, « à l’exclusion de tout point touchant au fond de l’expertise », d’éventuels problèmes liés aux délais d’exécution, aux communications de pièces, au versement d’allocations provisionnelles (art R 621-8-1).

Il est enfin possible que le président du Tribunal administratif décide de convoquer toutes les parties à une audience au cours de laquelle l’expert pourra fournir toutes explications complémentaires utiles et notamment se prononcer sur les observations recueillies (art R 621-10). L’ordonnance ne le mentionne pas, mais des difficultés mises au jour par l’expertise pourraient le justifier. 

27 mars 2023-État des lieux des procédures juridiques Bancs Publics